5. L’Homme du Petit Ry

Le site de la « Grande Carrière », appelée aussi carrière « du Ritchi » ou « du Petit-Ry », nous a révélé l’existence de ceux qui sont actuellement les plus vieux habitants connus de Namur. Pour vous en parler, rien de mieux que de vous reproduire ci-dessous un extrait de l’article qu’a rédigé à leur sujet Laurence Bouvin, lorsque leurs derniers restes furent exposés dans la cour d’Honneur en 2008. (Bulletin du CHAM n° 31, pp. 9-10).

Quand l’homme du Petit Ry vient à notre rencontre.

C’est au cours du premier trimestre 1962 qu’un étudiant de l’école normale, Michel Carpentier, fait ressurgir du passé les ossements de l’Homme du Petit Ry. Il découvre d’abord le crâne et quelques os longs sur une corniche de l’ancienne carrière alors qu’il est à la recherche de fossiles. Se rendant compte immédiatement que la trouvaille n’est pas anodine, il fait appel à des connaissances passionnées d’archéologie préhistorique à savoir Louis Eloy et deux habitants de Floreffe, Guy Bastin et Pierre Renier. Ensemble, ils observent plus attentivement les alentours de la trouvaille et récoltent d’autres ossements humains, des restes d’animaux et des outils de pierre.

Ces objets sont situés sur une corniche qui est en fait ce qui reste d’une grotte qui a été ouverte par l’exploitation du site.

Afin d’approfondir leurs connaissances, ils envoient leurs découvertes à Fr. Twisselman qui était professeur d’anthropologie à l’Université Libre de Bruxelles et chef de section à l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique. C’est à cette époque que des études plus poussées sont menées sur les trouvailles afin de les dater précisément.

On réalise alors qu’on est là en présence de quatre individus.

Le site à l’époque de la découverte

Le type des outils retrouvés ainsi que la nature des restes d’animaux évoquent une datation du mésolithique, c’est-à-dire la période située entre le paléolithique et le néolithique (voir ligne du temps).

On prélève sur le crâne des fragments microscopiques qui permettent d’effectuer une datation plus précise basée sur des analyses chimiques de l’os (carbone 14) et le résultat se précise : avec 68,2 % de confiance et 91 % de certitude, nous sommes en présence d’un Malonnois qui a vécu entre 8401 et 8135 avant notre ère.

Les spécialistes de la préhistoire parlent de la carrière de Malonne comme d’un site « martyr ».

En effet, on aurait pu en apprendre beaucoup plus sur ses habitants dans de meilleures conditions. Tout d’abord, les trouvailles ont été mélangées par l’exploitation industrielle puis par leur exposition aux intempéries.

Ensuite, lors de la découverte, aucune note n’a été prise sur la position précise des éléments, et en particulier sur la profondeur à laquelle ils ont été retrouvés, qui nous indiquerait si certains étaient plus anciens que d’autres. Cela aurait par exemple aidé à savoir si les animaux découverts étaient contemporains des restes humains ou non.

La disposition aurait aussi pu nous apprendre s’il s’agissait d’un lieu de vie, du lieu d’un accident ou effectivement, comme on le pense plutôt, d’une sépulture collective.

Les ossements ont ensuite subi des dégradations lors de leur conservation : comme les os s’abîmaient, ils ont été enduits d’un verni qui en a altéré la couleur. On a réalisé un moulage du crâne à l’aide de silicone et, lors de ces manipulations, utilisé de la vaseline, ce qui a rendu très difficile la datation chimique. En effet, la présence de ce produit risque de fausser les données.

Malgré toutes ces mésaventures, les ossements de l’Homme du Petit Ry sont aujourd’hui parmi nous.[1] Ils nous permettent d’entrevoir ce que fut sa vie et de nous arrêter un instant pour la comparer à la nôtre.

Laurence BOUVIN.

[1] On n’oublie pas que cet article fut rédigé à l’occasion de l’exposition de 2008, exposition qui s’était tenue dans le cadre de « La Fête au Village ».

Le crâne découvert

Résumé :

C’est en 1962 que furent découverts des ossements humains dans la carrière du Petit Ry, par des étudiants à la recherche de fossiles. Les restes trouvés appartiennent à quatre individus ; il s’agit vraisemblablement d’une tombe collective datant du mésolithique. L’analyse du crâne a permis de le dater entre 8402 et 8185  avant notre ère, ce qui en fait le plus vieil habitant connu de Namur.

Ces ossements étaient au fond d’une grotte que l’exploitation de la carrière avait presque – heureusement, presque seulement ! – détruite. Ces vestiges sont actuellement conservés au Musée des Sciences naturelles à Bruxelles.

Plus de précisions dans le bulletin du CHAM n° 31, novembre 2008.